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Couleur Lauragais : les journaux

Jardins naturels et préservation de la biodiversité

Lorsque nous parlons de jardin, il y a forcément l'intervention de l'homme, car s'il y a jardin il y a jardinage. Nous connaissons très bien les jardins à la française tirés au cordeau, les haies forment de belles lignes, des formes géométriques ou des courbes bien régulières et précises au centimètres près. Les jardins anglais inspirent plus de liberté, avec néanmoins pas moins d'exigence et de rigueur avec les fameuses "mixed bordes" où les plantes vivaces ont un droit d'existence toutefois bien organisé. Les jardins de curés s'inspirent des jardins italiens : un peu désordonnés, les grandes hampes florales retombent sur les allées pourtant bien droites, devenues encombrées le temps d'une saison. Chacun de ces jardins a son style et son jardinier, ses méthodes et ses inspirations.
petit coin de repos dans un jardin
Se réserver des petits coins "de repos" dans un jardin peut donner
un sentiment de partage, de communion avec la nature :
l'équilibre entre l'homme et son environnement.
Crédit photo : fotolia©Photolens

Comment faire la différence entre les types, les structures de jardins et pourquoi ? - Aux portes du Lauragais, il n'est pas gênant de retrouver des jardins méditerranéens, car juste après le partage des eaux, le climat est sous cette influen-ce. Par contre, commander un jardin exotique est loin de la réalité climatique de notre région. La demande de jardin japonais est encore très importante. Pourtant, le jardin naturel peut être assez proche dans sa conception.
Le jardin naturel répond à des exigences qui sont aujourd'hui au cœur des enjeux sociaux et planétaires. La première, c'est la préservation de la biodiversité que l'on sait mise en péril, y compris sur notre territoire et pas seulement dans les forêts amazoniennes. Savez-vous pourquoi ? Une espèce biologique disparaît chaque année par région en France : un insecte, une plante… C'est pourquoi les jardiniers préférent utiliser les plantes de pays pour aménager vos jardins, et ne plus utiliser de pesticides pour préserver nos insectes. En plus de cela en utilisant les plantes de pays, nous préservons notre paysage, son identité territoriale. Et par conséquent, la biodiversité.

le hérisson aide à se débarrasse des limaces et autres insectes
Dans un jardin naturel le hérisson vit tranquillement. Très aimé des particuliers,
il les aide à se débarrasser des limaces et autres insectes amateurs de légumes.
Crédit photo : fotolia©Antoine Cupial
Le jardin naturel est l'occasion de créer un écosystème - Nous ne jardinons pas uniquement pour les plantes mais pour l'ensemble de la vie au jardin : "Une plante, dix insectes, un oiseau". En jardinant il faut donc penser autant aux plantes, qu’aux oiseaux, aux mammifères et aux insectes : nous allons structurer tout un écosystème pour une meilleure adéquation entre le terroir et les êtres vivants, évitant en plus les produits phytosanitaires grâce à une régulation naturelle. Il faut garder à l'esprit la pyramide de la chaîne alimentaire : tous les êtres vivants dépendent les uns des autres, y compris l'espèce humaine. Cette perte en biodiversité vous semble peut-être anodine, pourtant c'est bien l'espèce humaine qui est menacée chaque fois qu'un bout de nature disparaît.

Le choix des haies
Les haies sont faites d'arbres et d'arbustes champêtres de pays, la haie vive est aussi utile. Nous limitons les apports de végétaux exotiques afin de privilégier les plantes de pays. Si nos haies étaient correctement aménagées dans les villes, les villages, la nature pourrait rentrer jusque dans les cœurs, permettre ainsi une bonne régulation : pas trop de moustiques, de rats, de fourmis, autant de déséquilibres provoqués par nous-mêmes. Pensez à planter dans vos haies champêtres des arbres fruitiers comme les pommiers, poiriers sauvages, ainsi que les noisetiers, châtaigniers, néfliers, noyers…

une haie naturelle diversifiée
Une haie naturelle diversifiée, mélange d'arbres, arbres fruitiers, arbustes et massifs
apportent des touches colorées au jardin. Crédit photo : fotolia©Christophe Fouquin

L’importance des sols
Une partie du gazon laissera la place à la prairie qui sera entretenue par une fauche tardive avec exportation (ramassage des herbes quelques jours après la fauche) pour rejoindre le compost ou servir de paillage dans les massifs, au potage…, voir une coupe tous les deux ou trois ans. On préférera la pelouse au gazon : ce dernier est ensemencé avec une composition que l'on trouve chez le marchand, il y a généralement du rays gras anglais, de l'agrostide traçante, de la fétuque rouge et du pâturin pour les compositions les plus équilibrées. La pelouse, c'est l'herbe de votre pays, elle est venue d'elle-même, parfois nous l'aidons à venir par un travail du sol et faisons appel à la banque de réserve qui est en terre. On peut aussi profiter d'une préparation de sol en fin d'été voir début d'automne au moment où les graminées des bords de routes, de chemins, des endroits où la nature existe encore pour laisser le sol se semer naturellement. Il est aussi possible de l'aider à venir avec un semis de gazon au départ, et avec l'espacement des tontes afin de permettre à la pelouse de s'installer. Réservez les tontes régulières chaque semaine, pour les lieux de proximité : pour installer la table de jardin, les abords des entrées de maisons, l'accès à l'abri de jardin, au garage, les aires de jeux…

Des aménagements naturels
Faites des allées tondues régulièrement se transformant en chemin de découverte de la nature, même dans votre jardin. N'oubliez pas de vous réserver un lieu à compost, derrière un buisson si la vue vous déplaît (pas sous les arbres). Les zones de petits boisements, de buissons impénétrables accompagnés par la ronce, et autres épineux sont protecteurs d'une nichée d'oiseaux… Tout en prenant garde à la sécurité, conservez un arbre mort ou au moins son tronc encore debout parfois couvert de lierre : Il deviendra un véritable HLM pour les pics, mésanges, grimpereaux, sitelles… Sans compter l'abondance de nourriture avec les insectes xylophages que fournissent les bois morts. Préservez les vieux arbres en limitant les tailles aux règles de sécurité et laissez toute une vie s'installer. Préservez ou recréez une zone humide avec une mare et évitez les viviers à poissons rouges qui représentent une pollution génétique, et laissez la place aux amphibiens. Remplacez la piscine au chlore par la baignade naturelle. Si l'eau de votre toiture va directement dans le fossé ou dans les égouts, pensez à la détourner pour lui redonner vie dans votre jardin, dans un petit marais ou une mare… Laissez du bois mort dans le sous bois ou sous les buissons, même quelques bûches : Les hérissons et autres mammifères trouveront leurs gîtes.

La diversité des plantations
Pensez au potager, et si le temps vous manque, vous pouvez toujours le fournir en plantes dites perpétuelles et condimentaires, comme les poireaux vivaces, la ciboule et ciboulette, topinambour, thym, romarin, estragon, rhubarbe, fraises des bois, framboisiers, groseillers, la mâche et les poireaux sauvages s'installeront d'eux-même… Plantez un verger avec d'anciennes variétés de pays, adaptés au climat, attention il faut bannir les arbres importés, renseignez-vous sur leurs origines territoriales, choisissez un producteur de pays pour vous conseiller. Utilisez d'anciennes variétés de roses, en plus d'être jolies et adaptées au climat, elles sont odorantes et leurs fruits, le cynorhodon (fruit rouge de l'églantier), vous apportera toute satisfaction en décoration hivernale, du jaune en passant par l'orange et du rouge. Les massifs fleuris ont aussi leur place, lorsqu'ils sont accompagnés de diversité avec une ossature de plantes vivaces, de bisannuelles accompagnées par des annuelles en prenant les précautions de ne pas utiliser de plantes hybrides. Laissez les hampes florales venues en fruit et en grain en fin de saison pour nourrir les passereaux, les insectes pondent dans les tiges séchées des plantes. Dans ce type de jardin, les fleurs sont un double apport de couleur, avec en plus les insectes butineurs, papillons, colibris, sphinx… Si votre jardin est jeune en végétaux, prévoyez des nichoirs, mangeoires pour accueillir la faune, faites des tas de branches artificiellement.
Dans les jardins naturels, le jardinier est avant tout un gestionnaire, il tente de réparer, restaurer, équilibrer les désaccords entre l'homme et la nature. On appelle cela la gestion différenciée.

La préservation de l'écosystème d'un jardin
favorise la richesse et la diversité des insectes dont le rôle
est important en particulier dans la pollinisation.
Crédit photo : fotolia©Stuart Corlett

 

 

Nicolas DERACHE

 

Couleur Lauragais n°120 - Mars 2010