Histoire d'antan
Lé Nostré oustal ou ostal (notre foyer)
En 2003, il nous paraît équitable d’être propriétaire d’une maison pour loger une famille. Autrefois, dans le terroir lauragais, on vivait ensemble à même pot et feu dans les "bordes" (métairies), les écarts ou les villages. Le logis n’appartenait pas à ses habitants, le nid domestique constituant le foyer ou "feu" faisait partie du patrimoine seigneurial. La population du Royaume se comptait par "feux".
Une
borde lauragaise
Le
fouage
Afin de financer l’engagement de ses troupes contre les Anglais (Guerre
de Cent Ans 1337-1453), le roi Philippe VI de Valois, fondateur de la bastide
de Revel, institua un impôt sur chaque "feu". C’était
le fouage évalué à 10 sols ou 1/2 livre.
Répartition
de l’habitat rural
Les "cabanes" ou chaumières serviles dépendaient soit
du seigneur laïque local soit d’un monastère ou d’une
ab-baye. Selon la coutume, les ruraux vivaient dans un "castrum"
(village fortifié), autour du château-fort ou dans les "salvetats"
(paroisses rurales) autour de la chapelle d’un enclos conventuel.
Affranchissement
Féodaux et Abbés concédèrent à leurs redevables
(serfs ou ruraux) le statut d’Homme libre. D’esclave "attaché
à la glèbe", le paysan se vit accorder des droits : liberté
de fonder une famille, de bâtir son "ostal" en pisé,
d’acheter, de vendre, de léguer et d’entreprendre.
C’est ainsi que la société médiévale des
campa-gnes se diversifia. Le serf affranchi, devenu sujet du Royaume, se fit
"brassier" (ouvrier agricole), alleutier, ménager de son
bien "l’alleu" ou laboureur, artisan de village, métayer
ou colon.
Le
"colon" ou citadin des bastides
Les "bastides", nouvelles villes fortes de regroupement des populations
apparurent après la Croisade albigeoise (1209-1229). Tout candidat
au relogement, serf affranchi par le fondateur, le "colon" disposait
dans la nouvelle cité d’une parcelle constructible: l’aïral
(10 brasses x 5 = 16,24 m x 8,12 m). Elle comprenait trois parties: l’ostal
en solier, le patu (courette à volailles) et l’ort (potager pour
les légumes du pot). L’émancipé avait pignon sur
rue.
L’ostal en solier
Afin d’insérer dans les remparts le plus de "feux",
les maisons étroites et hautes avaient un ou deux niveaux ou soliers
(étages) soutenus par de solides poutres en chêne. L’échoppe
occupait tout le rez de chaussée. Le chaume inflammable fut remplacé
par la tuile. Le soubassement de l’ostal était fait de moëlons
gréseux extraits des côteaux ?. Sur cette assise solide reposait
une charpente d’étais de soutien (les "corondes") chevillés
entre eux et aux poutres maîtresses. On bouchait les espaces avec du
torchis, mortier d’argile, d’eau et de paille hâchée
(pailhebart isolant).
La bauge était maintenue par coffrage jusqu’au séchage.
Ce procédé, hérité des Gaulois, s’appellait
"colombage" et en Lauragais : corondat.
La brique de four, matériaux onéreux, se vulgarisa dans le Pays
de Cocagne à l’Ere faste du Pastel (1453-1563).
Des expressions surannées ont ainsi longtemps prévalu dans les
Minutes des notaires de village :
"Acheter ou vendre une maison en solier"
"Vivre à même pot et feu"
Texte et graphies : Odette BEDOS
Couleur Lauragais N°57 - Novembre 2003