Gens d'ici
Christian Javersac calligraphe, l’art de l’écriture
La calligraphie, c’est l’art de bien former les caractères
d’écriture. Christian Javersac, un habitant de Montlaur, s’est
initié à cet art depuis quelques années. Il nous explique
les origines de cette passion et nous montre aujourd’hui quelques unes
de ses réalisations.
De l’école à l’écriture
Lorsqu’on lui demande d’où vient sa passion, Christian vous
parle d’abord de la plume "sergent-major" de son enfance. Celle
qu’écolier, il trempait dans l’encrier avant de dessiner
soigneusement les lettres et caractères des dictées de son enfance.
Christian adorait déjà l’écriture et plus généralement
tous les arts graphiques. Il commence par apprendre seul à dessiner
: bandes dessinées, portraits aux points, dessins d’humour, …
Plus tard, adulte, il réalise également des compositions magistrales
tel, par exemple ce fond de scène de 24 mètres carrés
dessiné à l’occasion du Gala national des prestidigitateurs
au théâtre du Capitole. Jusqu’alors, ce sont tous les arts
graphiques qui l’attirent de manière générale. Mais
Christian n’a pas encore trouvé sa voie…
Christian Javersac
Les
premiers pas en calligraphie
Car
sa passion, comme souvent, est d’abord passée par une rencontre.
Il y a une dizaine d’années, la fille de Christian parle à
son institutrice de la passion de l’écriture de son père.
Celle-ci le met aussitôt en contact avec Mr Millot, installé
sur Caraman, qui organise des concours d’écriture. Christian s’inscrit
aussitôt à l’un de ces concours où il est primé
dès la première année. Il participera désormais
au jury des éditions suivantes. Mais il recevra surtout les conseils
de Mr Millot pour faire son apprentissage dans cet art difficile qu’est
la calligraphie.
Et la passion le saisit très vite ! Pour sa première réalisation,
Christian choisit un texte de Kipling intitulé "Tu seras un homme
mon fils". Il prend sa meilleure plume, un papier canson 300 grammes
et rédige le texte dans une police de sa composition à mi chemin
entre une caroline tardive (écriture latine) et le gothique (proche
des polices germaniques). Il rajoute une lettrine, première lettre
ornée qui commence un chapitre ou un paragraphe. C’est son premier
texte calligraphié : il en fera bien d’autres !
La
calligraphie, ouverture vers d’autres disciplines
Car la calligraphie, c’est aussi pour Christian l’occasion de s’intéresser
à l’histoire médiévale régionale, de faire
des recherches héraldiques (sur les blasons et armoiries) ou généalogiques.
Pour réaliser ses textes, il se plonge dans l’histoire des cathares
et dévore les ouvrages historiques.
C’est aussi une formidable ouverture et un moyen d’échanges
vers d’autres cultures : Christian partage ainsi son expérience
avec des calligraphes arabes ou chinois.
La
chanson des albigeois
Ce
qu’il apprend dans les livres, Christian souhaite le mettre au service
d’un projet ambitieux.
Il y a quelques mois, il se lance sur la retranscription personnelle de la
chanson des Albigeois. 60 pages d’un livret entièrement personnalisé
avec, pour chaque page, plusieurs dizaines d’heures de travail en perspective.
A l’heure où nous l’avons rencontré, 20 pages avaient
déjà été réalisées avec des détails
d’une minutie exceptionnelle. Suprême raffinement, il intègre
une enluminure par page : soit une lettre peinte avec des couleurs et des
détails graphiques impressionnants, soit une miniature, peinture fine
de petit format.
Les
étapes de la conception des pages
La
réalisation d’une page est un long travail de patience. Christian
part du texte initial qu’il veut retranscrire. Il divise ce texte en
paragraphes puis trace une grille au crayon sur le papier. Il s’agit
alors de positionner chaque ligne ainsi que les lettrines et autres enluminures.
Il obtient ainsi une maquette de page sur laquelle il peut commencer à
écrire le texte. Christian a choisit une technique médiévale
qu’il a pu apprécier dans de nombreux textes : il comble les vides
sur les fins de ligne par des carrés et autres ornements complexes.
La réalisation des encres et le choix des papiers
La
prochaine étape sera désormais de réaliser lui-même
ses encres suivant les recettes les plus anciennes. Jusqu’à maintenant,
il utilisait les encres modernes conçues à partir de produits
chimiques. Mais il commence désormais à apprendre d’autres
"recettes".
Un calligraphe marocain lui a ainsi fait part de l’une de ses recette
de fabrication artisanale : une encre de couleur marron à base d’une
roche volcanique de couleur rouge, verte, bleue ou noire appelée "porphyre".
Il raconte aussi comment les anciens réalisaient une encre noire à
base de charbon pilée avec un liant comme le jaune d’œuf
mélangé à de l’eau. Tous les produits naturels peuvent
servir : la gâle du chêne ou encore la cochenille écrasée
qui donne un rouge carmin très apprécié par les calligraphes.
Ces couleurs naturelles tiennent mieux dans le temps et sont donc très
prisées pour des calligraphies de grande qualité.
Christian perfectionne aussi sa maîtrise de l’art de l’écriture
en choisissant soigneusement son papier : il aime en particulier utiliser
un papier entièrement végétal et naturel, préparé
par le "Moulin de Brousse".
Des réalisations variées
Outre
les adaptations de textes historiques, Christian réalise aujourd’hui
de nombreux autres textes : des actes de naissance enluminés, des blasons
familiaux ou encore des illustrations à la demande pour famille et
amis. Autant de textes qui marquent de façon originale les moments
importants de la vie de son entourage et constitue un patrimoine personnel
hors du commun.
Interview
Pascal RASSAT
Crédit photo : Collection C. Javersac
Couleur Lauragais N°38 - Décembre 2001