Balade
"Balades
du côté de Nailloux"
Couleur Lauragais vous conduit au Pays des Bastides du côté
de Nailloux, vers Villefranche et au Sud vers Mirepoix et Mazères
; après une visite approfondie de Nailloux nous vous proposons
trois circuits de découverte permettant de découvrir
de splendides églises gothiques (Montgeard) mais aussi du
roman (Baraigne) et des châteaux inconnus comme Marquein ou
Baraigne (un château du pastel).
|
Nailloux
ou la porte des bastides
Une bastide est un village neuf construit de toutes pièces dans
une nature vierge, une forêt par exemple, que l'on défriche.
Le plan est tracé sur le sol avant de construire les maisons
et les édifices comme l'église ou une halle. Les rues
sont bien droites, d'une largeur constante ; deux ou quatres portes
sont percées dans les murailles. La place du marché est
souvent entourée de galeries comme les garlandes de Revel et
l'on y trouve une maison commune avec un beffroi. Le fondateur de la
bastide est généralement le Roi de France, après
1249, date de la mort du dernier comte de Toulouse Raimon VII. De grands
seigneurs ont joué un rôle très actif comme le comte
de Foix (qui fonda Mazères) ou la famille des Lévis (Mirepoix).
Le Lauragais compte une quinzaine de bastides, soit une surprenante
densité qui s'explique par le souci du Roi d'établir son
autorité dans un Lauragais hostile qui a été la
forteresse du catharisme, et où un tribunal de l'Inquisition
a été massacré en 1242 à Avignonet. Nous
avons choisi Nailloux comme point de départ de notre balade pour
des raisons géographiques car cette cité est au centre
du réseau des villes nouvelles.
Une
cité composite
Le
site de Nailloux est très original et difficilement compréhensible
lorsqu'on traverse la ville en voiture. Des collines très allongées
appelées serres convergent à Nailloux, en déterminant
deux "bosses" de même altitude (285 mètres) où
se fixe l'habitat vraisemblablement à l'époque gallo-
romaine. Entre les deux noyaux élevés, un chemin, devenu
la rue de la République dans l'agglomération actuelle
sépare les deux "bosses".
Quatre parties sont à parcourir : d'abord le quartier du vieux
fort avec la porte Nord, la place de l'église et l'église.
Ce fort du XIIIème siècle est le coeur le plus ancien
du village. Il était entouré non pas de murailles mais
de simples fossés.
Deuxième partie, à l'Est du fort, le quartier d'extension
avec la bastide de 1318 et ses quatre rues parallèles. La rue
de la République était bordée par des moulins dont
un avait six bras. Le quatrième quartier est celui du Laytié
(la route de Villefranche). C'est un ancien village appelé Viviers,
indépendant par rapport au vieux Nailloux. Jusqu'en 1789, Viviers
appartenait aux Hospitaliers de Caignac et en 1792 il est rattaché
à la commune de Nailloux.
L'église
de Nailloux est un très bel édifice du XVIème siècle,
une église du pastel avec à l'intérieur des panneaux
d'albâtre, un autel en marbre de Caunes dont l'origine est l'abbaye
de Boulbonne (Ordre de Citeaux) à Cinte-gabelle, des stalles
remarquablement sculptées provenant de la même abbaye.
La halle est entièrement en briques rouges (fin du XIXème
siècle). Avec ses mesures, elle est le symbole de la puissance
économique passée de Nailloux, centre commercial pour
le blé de toute la contrée avec les exportations par le
port de Gardouch. Jusqu'en 1940, en un bref raccourci, Nailloux, c'était
la halle plus la route de Gardouch, poumon de la cité.
Une
histoire agitée
Le premier document écrit sur Nailloux date de 1292. C'est une
charte en latin par laquelle le roi de France pénètre
à Nailloux par un échange de terres : le domaine des Bastards
à Ayguesvives dont il était propriétaire avec la
"vila de Analhosium" qui appartenait aux frères de
Villèle. Cette famille des anciens seigneurs est bien connue
comme solides cathares se faisant inhumer dans le "cimetière
des hérétiques" de Montesquieu. Nailloux a un passé
cathare comme Gibel, le village voisin dont les habitants sont interrogés
par l'Inquisition en 1245. En 1317 le Roi fonde la bastide de Montgeard
très près de Nailloux pour la peupler avec des habitants
venus du deuxième village. Mais ce plan fonctionne mal car Nailloux
obtient en 1318 la création du quartier de la bastide à
l'Est du fort. Grâce à son marché Nailloux l'emportera
démographiquement
sur Montgeard.
A la fin
de la période révolutionnaire (1789-1799), Nailloux joue
un rôle important dans le soulèvement royaliste d'août-septembre
1799 contre la République du Directoire. Il s'agit d'une insurrection
massive, violente mais courte (deux mois) de tout le Sud Ouest de la
France. Le Lauragais est un des principaux centres avec des milliers
de soldats-paysans improvisés qui tentent de s'emparer de Toulouse
et de son arsenal. Nailloux est un important centre de rassemblement
et de concentration des insurgés qui s'emparent de la petite
ville puis marchent sur Cintegabelle, occupent Saverdun, se dirigent
vers Pamiers et sont défaits à la bataille du Vernet.
Le bilan global du soulèvement sera très lourd : 4000
morts, surtout des "royaux". L'un des principaux chefs était
le comte de Paulo, de Calmont.
Nailloux
apparaît à nouveau dans l'Histoire en mars 1814 avec l'arrivée
de l'armée anglaise du général Hill qui venait
d'Espagne. Napoléon en 1808 occupe le Portugal puis une partie
de l'Espagne. Le soulèvement des paysans espagnols, une guérilla
effroyable, oblige les Français à évacuer progressivement
le pays. Une armée anglaise commandée par le meilleur
général, Wellington, débarque dans le Nord du Portugal
et suit la retraite du maréchal Soult par Bayonne. Wellington
était à la tête d'une armée internationale
composée d'anglais, de portugais, d'espagnols, et un corps de
cavalerie allemande. Soult s'enferme dans Toulouse et Wellington est
à Saint Cyprien. Craignant l'arrivée de renforts français
venant de Narbonne, les Anglais lancent un corps d'armée (soit
13 000 hommes) dans le Lauragais pour couper la route à Villefranche.
Depuis Toulouse, ils traversent la Garonne du côté de Roques
puis remontant la vallée de l'Ariège jusqu'à Cintegabelle,
ils marchent sur Nailloux. Les routes sont des pistes en terre argileuse,
il a plu durant tout le mois de mars et toute circulation était
impossible dans les collines de Nailloux. L'artillerie s'embourba et
ne put atteindre Nailloux. Seule la cavalerie atteindra le village et
des patrouilles anglaises pousseront même au delà jusqu'à
la bataille d'Ayguesvives. L'argile naillousaine a eu raison des canons
anglais.
Une
explosion démographique
L'histoire contemporaine de Nailloux, en 2000, est marquée par
deux évènements fondamentaux. D'une part de très
nombreuses constructions de maisons modernes conduisent à une
augmentation très forte de la population qui double en dix ans
pour atteindre d'abord 1400, puis bientôt 1600 habitants. La petite
cité endormie est bourdonnante d'activités : ouverture
de nouveaux commerces, problèmes scolaires, des camions monstrueux
dans les rues. L'autre évènement majeur est la construction
d'une autoroute A 66 de Toulouse à Pamiers et au delà
une voie rapide vers le tunnel du Puymorens et Barcelone. Un échangeur
est en construction pour Nailloux qui ainsi sera en liaison directe
avec le réseau routier européen. Une zone d'activités
permettra la transformation radicale de l'activité économique
de toute la région.
Du pastel
et du blé
Ne quittons pas Nailloux sans quelques lignes sur son histoire économique
: nos collines sont le pays du blé depuis 6000 ans et elles sont
restées une des micro-régions les plus fertiles du Lauragais
(la récolte 2000 n'a donné cependant que des résultats
moyens). Le Naillousain a été une région riche
en pastel avec six moulins pasteliers que nous avons localisés
sur un vieux cadastre de 1676. L'empreinte du pastel est restée
partout présente dans l'architecture avec des églises
du pastel (Nailloux, Montgeard), des châteaux (Montgeard, Marquein),
des pigeonniers-tours (Monestrol et le Bouyssou à Cintegabelle),
des cloches du pastel.
A la
découverte d'autres bastides et castra
Voici trois circuits de découverte à partir de Nailloux
désormais appelée la "Porte des Bastides", grâce
à l'arrivée de l'autoroute.
Le circuit
A (voir croquis) nous conduit à Montesquieu, village aux rues
concentriques autour d'un château, véritable circulade,
qui a hébergé un cimetière cathare. Saint Rome
est une bastide qui ne s'est pas développée et qui possède
un château très original. Villenouvelle possède
un clocher-mur typique. Villefranche et son énorme clocher, la
place de la Pradelle, l'immense halle témoin d'un intense commerce
du blé exporté par le port de Gardouch. Avignonet est
une des clefs du seuil de Naurouze que l'on découvre depuis l'église,
bâtiment exceptionnel par ses dimensions et ses voûtes gothiques.
La place Raimon d'Alfaro correspond à l'emplacement de l'ancien
château où eut lieu le massacre des Inquisiteurs en 1242.
A Montferrand il faut voir l'église Saint Pierre d'Alzonne entièrement
romane, sauf le clocher, les thermes gallo-romains, les sarcophages
wisigoths, les ruines de l'église paléo-chrétienne
du IVème siècle et sur la colline le phare de l'Aéropostale,
souvenir du passage de Mermoz, Saint Exupéry et Guillaumet. Un
détour nous amène à Baraigne avec une église
romane, des stèles, un château du pastel. Nous terminerons
à Castelnau-dary avec les collines du Pech (moulin restauré
de Cugarel) et du Présidial (voir le musée) et les bâtiments
de la sénéchaussée de Catherine de Médicis,
les hôtels, le Grand Bassin, l'escalier d'écluses de Saint
Roch.
Le circuit
B nous mène au Sud de Nailloux vers Cintegabelle : son pigeonnier,
l'église avec un portail roman, des orgues exceptionnelles, l'emplacement
de l'ancien château forteresse des comtes de Toulouse. Le pont
sur l'Ariège où défilèrent les Anglais,
enfin, à Tramesaygues, les restes de l'abbaye de Boulbonne (ordre
de Citeaux). A Mazères, grosse bastide des comtes de Foix avec
un plan type en damier, les ruines d'un vieux pont sur l'Hers. Molandier,
encore une bastide, avec un clocher mur pignon et onze baies campanaires.
Depuis Mazères on peut gagner Pamiers, le tunnel du Puymorens
et la Catalogne. C'est un véritable paradis pour l'art roman
avec ses 2000 églises romanes. Visitez également Plaigne
et son sarcophage gallo-romain, Ribouisse, une autre bastide, et enfin
Mirepoix une des plus belles bastides de la région avec sa place
et ses couverts.
Le circuit
C, de Nailloux, nous fait admirer Montgeard avec une des plus belles
églises gothiques du Lauragais, une église du pastel,
dans laquelle sont inhumés les marchands pasteliers qui ont contribué
à sa construction. Caignac a conservé les beaux restes
du château du Comman-deur de l'Ordre des chevaliers de l'Hôpital
de Saint Jean de Jérusalem, qui possédait d'immenses domaines
(granges) dans la région. A Marquein, voyez les stèles
discoïdales et l'énorme château du XVIème siècle
(époque du pastel). Payra sur l'Hers, son portail roman et encore
un château du pastel. Fanjeaux pour son passé cathare,
la maison de Saint Dominique, l'église gothique, le Seignadou
et le monastère de Prouille. Depuis Fanjeaux, on gagne Castelnaudary.
La renaissance
du moulin à six ailes
Le moulin de Nailloux à six ailes est en train de renaître.
Tout est prêt pour le faire revivre en reconstruisant à
l'identique le même bâtiment. La municipalité l'a
choisi comme meilleur symbole du Naillousain et a souhaité le
reconstruire en utilisant les moyens financiers apportés par
les Autoroutes du Midi de la France, l'Etat (dans le cadre du 1% paysage
et développement de la A66), et les collectivités territoriales,
et notamment la future communauté de communes de Nailloux et
le Conseil Général. Le dossier technique est bouclé
; l'emplacement choisi se situe près de l'échangeur, entre
la ferme du Gril et le hameau des Pourquiers. Il sera la porte d'entrée,
ou de sortie, du Pays des Bastides avec aménagement de bâtiments
d'accueil d'un "Syndicat d'initiatives" visant au développement
du tourisme en Lauragais, les Pyrénées et la Catalogne
si proche. Le moulin de Nailloux vous proposera des balades pédestres,
équestres et automobiles sur l'ensemble du canton et aussi des
circuits vers Toulouse, vers Revel et la Montagne Noire ou encore vers
les châteaux des Corbières, Saint Michel de Cuxa, Saint
Martin du Canigou, San Pedre de Roses ou Poblet et Santa Creus. Ce sera
alors un véritable centre, porte touristique de la France du
Midi et de la Catalogne.
Jean
ODOL
Couleur
Lauragais N°27 - Novembre 2000
|