Balade
du côté de Salles sur l'Hers
Le canton de Salles sur l'Hers comprend 14 communes et s'étend
sur une région géographique originale : la Piège.
Salles rayonne sur de petites communes (*) qui ont été
beaucoup plus peuplées au XIXème siècle mais
qui ont perdu l'essentiel de leur population à cause d'un
important exode rural vers Toulouse, Carcassonne et le vignoble
du Narbonnais. |
La Piège
La
Piège est une région de collines assez élevées
culminant à 415 mètres au Puy de Faucher, au sud de Laurac.
Autour de Salles, les sommets des collines sont à 300-320 mètres.
Les roches qui affleurent sont des bancs de grès, de calcaire,
de poudingues, d'argiles qui, en surface, se transforment en sols très
médiocres, souvent pauvres, et très sensibles à
la sécheresse estivale. Cette faiblesse des sols explique la
permanence de très belles forêts (vers Gaja la Selve),
de nombreux bois, et de friches un peu partout. La
Piège a connu un important élevage de moutons avec des
marchés très animés comme en témoignent
toujours les grandes plaines de Molandier et de Salles. Une ligne de
chemin de fer appelée "le petit train de la Piège"
reliait Castelnaudary à Belpech en passant par Salles sur l'Hers.
Cette ligne permettait d'exporter les moutons, mais aussi l'avoine,
l'orge, les fourrages en direction de Narbonne. Le petit train a disparu
vers 1935 mais les gares sont toujours là, comme à Salles
et à Pech Luna.
A Salles
Nous commençons notre balade par Salles, une bastide née
vers 1250. Les bastides sont cons-truites soit à l'initiative
du roi de France, soit vers le sud, à Mazères par le comte
de Foix, ou à Mirepoix par la famille des seigneurs, les Levis.
Pour le Lauragais, elles sont le symbole du pouvoir royal qui s'implante
(à Nailloux, à Montgeard, à Salles) dans une contrée
qui a été cathare et est réputée hostile.
Salles occupe un point stratégique important à la limite
de deux vallées donc de deux routes : la branche nord de l'Hers,
et le ruisseau qui est originaire de Mayreville et Peyrefitte. Salles
est dominée par un énorme donjon qui serait du XIIème
siècle. Mal connu, mystérieusement sans ouverture (ou
presque), il comporte une très belle salle sur croisée
d'ogives. L'autre partie du village présente le plan classique
d'une bastide avec des rues rectilignes et une place immense. Le style
de l'église est très pur : une église du pastel
(donc du XVIème siècle), gothique, un clocher typique
du Lauragais, un mur pignon triangulaire (classé monument historique).
Saint Michel
et la Ganguise
A
Saint Michel de Lanès, il faut voir tout d'abord la très
belle série de stèles discoïdales qui se localisent
dans le cimetière (à gauche en entrant). Ces stèles
retrouvées dans le vieux cimetière du Moyen-Age devaient
marquer certaines tombes. Le disque est souvent historié : ici
une très belle croix du Languedoc, avec les 12 boules, croix aussi
des comtes de Toulouse. Le clocher de l'église est un mur pignon
triangulaire. A Belflou, un très beau château du pastel (XVIème
siècle). Nous rencontrons partout des vestiges architecturaux liés
aux fortunes tirées de la production et du commerce du Pastel.
L'âge d'or de «l'herbe du Lauragais» se situe vers 1460-1562.
Au Nord-Est de Belflou, dans la cours du château de la Barthe, on
trouve une très belle discoïdale. En se rendant encore vers
le Nord-Est, nous voici sur les bords d'un superbe plan d'eau : le lac
de la Ganguise. Une soixantaine d'hectares, des millions de mètres
cubes d'eau retenus par une digue en terre. Le ruisseau ainsi barré
est la Ganguise qui donne son nom au lac. Ce dernier est alimenté
depuis Nau-rouze avec des eaux venant de la Rigole et aussi par de l'eau
issue du barrage de Montbel. Ce lac est particulièrement apprécié
par les amateurs de planche à voile.
Du côté
de Baraigne
C'est
ici la région des sources du Fresquel, cette rivière qui
se dirigera vers le Nord-Est après être passée sous
le Canal du Midi et qui recevra tous les torrents de la Montagne Noire
(lampy, Alzeau) avant de confluer avec l'Aude près de Carcassonne.
La façade sud de ce château du pastel (encore un autre,
ils sont très nombreux en Lauragais) est grandiose avec une enceinte
quadrangulaire, des tours aux angles, une très belle pierre jaunâtre.
L'église de l'Assomption est du XIIème siècle et
l'une des mieux conservées du Lauragais. De petites dimensions,
elle est sombre, sans fenêtres, avec un bel arc triomphal, surtout
un très simple portail roman et une discoïdale à
l'intérieur. On peut aussi voir d'autres stèles contre
les murailles extérieures au cimetière, et de belles arcatures
lombardes au chevet de la nef (à l'extérieur).
Au Sud-Est de Baraigne, Molleville. Le château a été
la propriété de Bertrand de Molleville, ministre de la
marine sous Louis XVI. Il est du XIIIème siècle mais a
été remanié aux XVIème et XVIIème
siècles avec des murs très massifs, crénelés,
et quatre tours d'angle carrées.
Marquein
et Fajac la Relenque
En passant par Cumiès (stèles au cimetière) et
Montauriol, (qui signifie la "colline au loriot"), nous traversons
Saint Camelle (dont une partie de l'église est romane), et nous
atteignons alors Marquein. Encore des stèles sur le mur du cimetière
mais, réelle surprise, en contrebas du village, un énorme
château, par ses dimensions l'un des plus grandioses du Lauragais.
Classé monument historique, c'est encore une construction du
Pastel avec d'immenses toitures Renaissance, belles tuiles rouges, quatre
tours d'angle, une cheminée gothique, un escalier. Le château
a connu une histoire très agitée. En août 1799,
à la fin de la Révolution, une violente insurrection royaliste
a soulevé contre la République du Directoire des dizaines
de milliers de paysans lauragais. Les insurgés ont failli s'emparer
de Toulouse en août 99. Ils se concentrent à Muret, essayent
de se replier vers l'Espagne et se font écraser à Montréjeau.
Ce soulèvement a fait de nombreuses victimes : 6 000 morts environ.
Marquein a joué un rôle important au début dans
le rassemblement des insurgés du canton de Salles. C'est dans
ce château que les royalistes se groupèrent. Les uns occupèrent
pendant quelques jours la ville de Salles. Un autre groupe se rendit
à Nailloux et à Terraqueuse (Cintegabelle) pour marcher
sur Saverdun. Ils furent défaits à la bataille du Vernet
par les républicains de Pamiers et de l'Ariège. A Fajac
la Relenque, un nouveau château du Pastel, tout en briques, à
voir et visiter absolument.
Le portail
de Payra
Nous terminerons cette balade par le portail roman de Payra sur l'Hers,
une petite merveille architecturale, notamment les têtes sculptées,
des modillons soutenant la corniche et à droite, un lapin.
La région de Salles vous offre ces monuments oubliés dans
quelques frais vallons. Trop souvent aucun panneau n'indique un château
exceptionnel. Nulle part ne sont signalées les discoïdales.
Ami lecteur, avec une bonne carte (au 1/25.000) et Couleur Lauragais,
je vous conduirai au donjon de Salles ou au château de Marquein.
Pour cette balade, je vous souhaite bon vent, d'autan.
Jean
ODOL
(*)
Ces communes sont Ba-raigne, Belflou, Cumiès, Fajac la Ralenque,
Gourvieille, La Louvière, Marquein, Mézerville, Molleville,
Montauriol, Payra sur l'Hers, St Michel de Lanès, Sainte
Camelle. |
Couleur
Lauragais N°16 - Octobre 1999
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