accueil
Couleur Lauragais : les journaux

Reportage


"Les pigeonniers du Lauragais"

Couleur Lauragais vous propose, pour ces vacances estivales, de découvrir le Lauragais au travers d'un itinéraire original : la route des pigeonniers ou comment découvrir un nouvel aspect de notre région.


Dans beaucoup de villages du Lauragais, des pigeonniers apparaissent, aux formes très variées, depuis l'énorme tour cylindrique du Bouissou (Cintegabelle) classée monument historique, jusqu'aux tours pigeonnières qui encadrent les façades de maints châteaux. Les pigeonniers sont partout et, souvent, de modestes constructions émergeant au dessus des toits d'un village. Ces monuments ruraux sont aujourd'hui généralement abandonnés car l'élevage des pigeons a complètement changé de caractère et les oiseaux à demi sauvages que sont les touriers se sont réfugiés dans les clochers des églises, où ils subsistent sans recevoir la moindre nourriture de l'homme.


LE DROIT DE PIGEONNIER, AVANT 1789, L'APANAGE DES NOBLES

Dans certaines communautés du Lauragais, le pigeonnier était un privilège noble appartenant au seigneur haut justicier, seuls les plus grands seigneurs et grands propriétaires avaient donc la possibilité de posséder un pigeonnier. Le bâtiment était isolé du château mais toujours en un lieu élevé pour qu'il soit visible de loin. Le seigneur affirmait ainsi son prestige social. Les dimensions du pigeonnier sont proportionnelles à la surface du domaine : il est d'autant plus grand, avec des centaines d'oiseaux, que le domaine est vaste. Au Bouissou, il comptait plusieurs centaines d'hectares. Le pigeonnier est l'affirmation ostentatoire d'un prestigieux rang social. Ce privilège était la règle au XVIème siècle, époque ou s'élevèrent de nombreux pigeonniers de grandes dimensions appelés les pigeonniers du pastel construits souvent entre 1460 et 1560, c'est à dire au coeur de l'âge d'or du pastel. Ces pigeonniers du pastel s'ajoutent aux autres édifices déjà évoqués dans ce journal et datant de la même époque (églises, châteaux ou encore hôtels du même nom, comme Assézat et Bernuy sur Toulouse).

Le droit de colombier connaît de nombreuses exceptions avec la construction des bastides du XIIIème siècle, puis au XVIIIème siècle, beaucoup de seigneurs vendirent leur privilège aux communautés, ce qui explique la prolifération des petits pigeonniers dans les villages. Le droit de colombier disparaît définitivement en 1789.


CARACTERES ORIGINAUX D'UN COLOMBIER


Type lauragais à Lanta
Le pigeonnier est une construction plus complexe qu'il n'y paraît, une construction qui doit résoudre des problèmes relatifs au logement des couples de pigeons appelés touriers, mais aussi permettre leur visite, la récupération des pigeonneaux et leur protection. Il doit enfin pouvoir servir à la conservation de la colombine. Il s'agit d'un engrais (plus communément appelée fiente) très recherché, très riche, très concentré en principes fertilisants et destiné en priorité à fertiliser les vignes.

Dans certaines régions viticoles, la colombine est tellement prisée que, dans les contrats de mariage, la future mariée reçoit dans sa dot un certain poids de colombine (dans le Lot par exemple). Les nids s'appellent des boulins avec de nombreux types, en poterie, en osier, en bambou et torchis. Le nid est parfois prévu lors de la construction du pigeonnier dans l'épaisseur du mur, ainsi au Bouissou les boulins sont des conduits (de 15cm x 15 cm) aboutissant au nid plus large pour que la pigeonne puisse tourner pour sortir. Les trous d'envol sont toujours de petites dimensions (10 cm x 10 cm), ronds ou carrés, interdisant l'entrée à tout oiseau plus gros (épervier, faucon ou chouette). Contre les animaux grimpeurs (rat, belette, fouine, putois ou loir), des corniches ou des cordons de briques en saillie ceinturent le pigeonnier. Des carreaux de terre cuite vernissée, d'un beau vert en général, appelés randières, ou des bandes métalliques en zinc interdisent l'ascension des nuisibles. Les capacités d'accueil sont très variables : de 50 nids à plusieurs centaines (1000 au Fort de Monestrol).

Des milliers de pigeons peuplaient ces étranges demeures, se nourrissant l'été dans les céréales de la communauté (constituant ainsi un droit féodal invisible que le seigneur prélevait sur les paysans). L'hiver, les oiseaux recevaient parfois quelques grains mais l'entretien d'un pigeonnier restait toujours d'un coût particulièrement faible.


Dispositif anti-prédateurs
Pigeonnier de Montgey-Auvezines
UNE ARCHITECTURE TRES VARIEE

Les formes architecturales sont variées à l'infini. Cependant, on peut essayer de distinguer des pigeonniers intégrés dans les bâtiments de la maison avec un pignon triangulaire ou un fronton, ou un pigeonnier tour avec des toits en pied de mulet à un versant, versant double, versant triple. On trouve également des pigeonniers - tour d'angles de part et d'autre de la façade principale de la maison de maître ou du château. Le pigeonnier de type Lauragais est quant à lui souvent isolé, de base carrée, reposant sur 4, 6 ou 8 piliers selon l'importance du domaine (par exemple Labège, Lanta, Auvezines, Bram, la Hille, Fanjeaux, Caraman).


UN COLOMBIER TOUR CYLINDRIQUE

Ils sont de forme cylindrique, 8 mètres de haut, avec un toit à clochetons. Trois sont bien connus : le Bouissou (à Cintegabelle), le Fort (à Monestrol), la Comtesse (à Auzeville). Celui du Fort date de la fin du XVème - début du XVIème siècle. Il a été construit par la famille des Durand de Montgeard, richissimes marchands de pastel qui possédaient de vastes domaines à Montgeard et Monestrol et dont la fortune a permis la construction des châteaux de Faja la Relenque, de l'église et du château de Montgeard. Au Fort, la tour mesure 8 mètres de haut, 4 mètres de. diamètre. Le Sommet est agrémenté, de 4 clochetons autour d'une lanterne centrale. A 4 mètres au dessus du sol, une belle corniche en pierre moulurée en corbellement dissuade efficacement la montée des rongeurs. A l'intérieur, on trouve 950 nids dans l'épaisseur des murs, disposés en cercles concentriques. Une poutre est fixée verticalement au centre de la tour et supporte une échelle tournante permettant la cuillette des oiseaux. La voûte est une très belle coupole, une construction savante en brique.


SUR LES ROUTES DES COLOMBIERS

Nous vous proposons deux circuits, deux routes des colombiers pour découvrir les plus beaux pigeonniers du Lauragais. Nous indiquons en même temps les principaux monuments à visiter et villages à découvrir.


CIRCUIT 1
: durée d'une journée avec point de départ à Cintegabelle.

1. Cintegabelle : une bastide.
- à Tramesaigues : restes de l'abbaye prestigieuse de Boulbonne, ordre de Citeaux,
- église intéressante, orgues remarquables,
- prendre la route de Nailloux D 25, à 4 km, sur la gauche, le pigeonnier du Bouissou (accès facile), le plus grand pigeonnier du Lauragais.
2. Nailloux : bastide fondée en 1318.
- autour de l'église, un très ancien fort, à l'est : 4 rues parallèles,
- église du pastel.
3. Montgeard : une bastide de 1317.
- un château du pastel, monument historique,
- l'église gothique : une des plus belles du Lauragais,
- plan orthogonal de la bastide.
- prendre la route de Mazères, après 4 km se trouve le pigeonnier du Fort, à droite (difficile à voir).
4. Monestrol : un château du XVIIIème siècle (belle époque du froment).
- deux pigeonniers : au Fort et dans la cour du château.
5. Marquein : splendide château du XVIème (ne se visite pas). Voir également les stèles discoïdales sur le mur du cimetière.
6. Fajac la Relenque : château du pastel.
7. Molandier : une bastide.
- église avec 10 baies campanaires.
8. Belpech : splendide portail roman de l'église, église intéressante, stèles discoïdales à l'intérieur. Remonter la vallée de la Vixiège jusqu'à Fanjeaux.
9. Fanjeaux : le pigeonnier est au hameau de la Hille, de type Lauragais.
- au village, maison de Saint Dominique, le seignadou (panorama),
- couvent des Dominicaines au centre du village avec chapelle du XIVème siècle,
- la rue des cavaliers,
- Prouille, monastère de moniales fondé par St Dominique,
- église gothique avec la fameuse poutre du miracle du feu.
10. Bram : village circulaire.
- château de Lordat (sortie Nord du village) XVIIIème siècle,
- aller vers le canal et voir, sur la gauche, le pigeonnier avant d'atteindre le port de type Lauragais et d'accès facile,
- port sur le canal : très important centre d'exportation du blé,
- étude du canal de Riquet.

circuit 1
Circuit 1


CIRCUIT 2 : durée d'une journée avec point de départ à Lanta.

1. Lanta : le pigeonnier est près de l'église de Saint Anatoly, plan carré sur 8 pieds. Voir aussi la belle église en brique et son clocher original.
2. Montgey - Auvezines : pigeonnier à Auvezines, lieu dit «en Fourmen», près de la route conduisant à Revel,
A Auvezines : près du cimetière, stèle commémorant le massacre de 6000 Croisés en avril 1211.
3. Caraman : pigeonnier de type Lauragais, devant la mairie, à 100 m au Nord Ouest.
4. Vauré, ancien village aujourd'hui disparu, important centre cathare.
5. Revel : bastide de 1342, la plus grande du Lauragais.
A voir :
- la place entourée de couverts,
- la halle, le beffroi.
6. Labécède : village fortifié, une porte, des stèles discoïdales.
- les magnifiques forêts de la Montagne Noire.
7. Verdun Lauragais : village pittoresque, dernier village cathare (1320).
8. Saint Papoul : abbaye bénédictine carolingienne, très beaux restes de l'ancienne cathédrale et le cloître (documentation à l'accueil).
9. Juzes : un pigeonnier près de la route, à 500 m du village.
10. Trébons sur la Grasse : tour énigmatique, allure d'un minaret au lieu dit «en Rigaud».
- château d'en Rigaud avec deux pigeonniers en façade.
11. Villefranche de Lauragais : bastide d'Alphonse de Poitiers vers 1250-55, plan orthogonal.
- belle église du pastel, remarquer les voûtes de la nef.

circuit 2
Circuit 2


Jean ODOL

 


Couleur Lauragais N°14 - Juillet/Août
1999