Gens d'ici
" Le minotier de Saint Martin Lalande "Les
anciens moulins, à vent ou à eau, font partie du paysage du
Lauragais. Jean Mazières est minotier à Saint Martin Lalande
depuis plus de 50 ans. Il nous parle de son métier et propose, pour
Couleur Lauragais, de nous expliquer la fabrication de la farine.
Jean
Mazières. Minotier à Saint Martin
Lalande |
L'évolution
du secteur a aussi entraîné une évolution des outils.
L'industrie s'est adaptée aux exigences de la production : la meule,
traditionnellement en pierre, a été rapidement remplacée
par des cylindres plus solides et plus rentables. Avec 100 kg de blé,
on produit aujourd'hui environ 75 kg de farine et 25 kg de son, destiné
à l'alimentation du bétail. Le travail à la meule permettait
de récupérer au mieux 62 kg de farine. De plus, comme l'explique
Jean Mazières, le cylindre donne une farine plus pure que la meule,
avec un goût légèrement différent.
Ensacheuse (crédit photo : J-M Faget) |
Une fois que les proportions du mélange sont déterminées, le blé est nettoyé, brossé et légèrement humidifié. Une étape importante mais dont ne s'embarrassaient pas les meuniers d'autrefois. À une époque, raconte en souriant Jean Mazières, la farine était certes constituée de blé mais aussi de beaucoup de poussière, et parfois même de crottes de souris et autres éléments très sales. Les normes d'hygiène garantissent aujourd'hui une farine impeccable. La pureté a d'ailleurs son unité de mesure : le taux de cendre. Jean Mazières explique que ce taux se calcule en brûlant 5 gr de farine et en observant les résidus minéraux qui subsistent après la cuisson. Le taux de cendre est ainsi déterminé sur une échelle allant de 45 à 110. La majorité des farines qui sortent de la minoterie ont aujourd'hui un taux de cendre compris entre 55 et 65, précise Jean Mazières.
Un dernier tamisage de sûreté et c'est le conditionnement par sacs de 50 kg et l'expédition. La production de la minoterie Mazières est acheminée ensuite vers plus d'une centaine de boulangeries artisanales, sur cinq départements entre Toulouse et Nîmes.
La production de la farine a longtemps constitué un enjeu national majeur : l'État souhaitait à tout moment connaître la capacité de production des minoteries françaises en cas de guerre et de crise. Autour de 1935, étant donné la surproduction et la chute du prix du blé, l'État avait imposé, dès 1936, un contingentement de la production. Ce système, unique en Europe, perdure encore aujourd'hui puisque les moulins doivent posséder un « droit de mouture » qui peut s'acheter d'un moulin à l'autre. On trouve ainsi encore quelques minoteries familiales, où le droit de mouture se passe de génération en génération, et des groupes plus importants qui travaillent surtout pour les boulangeries industrielles et les surgelés. Rien à voir cependant avec les plus grosses minoteries du monde que l'on trouve aujourd'hui dans les pays du tiers monde.
La minoterie de Saint Martin Lalande demeure quant à elle une entreprise de taille humaine. Elle fait partie intégrante de la tradition du Lauragais et perpétue la méthode de fabrication de la farine en utilisant les mêmes recettes que les meuniers d'autrefois.
Pascal Rassat
Jean-Marc Faget
Couleur Lauragais N°6 - Octobre 1998