La météorologie dans le Lauragais
En Lauragais, la météorologie tient une place particulièrement importante. En effet, cette région a toujours été fortement marquée par l’Agriculture ; or, les activités des hommes dans le monde rural ont toujours été sensibles aux caprices du temps, et les aléas météorologiques pouvaient même parfois, dès les temps les plus anciens, conduire à la misère. Aujourd’hui, la planification des travaux, les traitements agricoles, la protection des végétaux, l’irrigation, le rendement des cultures... sont dépendants du temps ; c’est pourquoi les agriculteurs suivent attentivement les prévisions.
La
météorologie est également utile dans bon nombre de secteurs
: du véliplanchiste aux services de sécurité. En effet,
la Sécurité Civile a besoin des bulletins d’alerte météorologique
(bulletins ALARME) pour informer la population et intervenir en cas de risques
de tempêtes, d’inondations, de neige, de pollution de l’air,...
C’est aussi le cas pour les équipements, les industries (EDF,
GDF, les grands chantiers, l’urbanisme, les études de site, le
chauffage urbain...).
Le
temps en Lauragais
Dans la région, le climat est qualifié de "modérément
capricieux" ou de "décevant". En effet, balayé
par des masses d’air essentiellement océaniques, les influences
atlantiques sont majoritaires (cers ou vent de nord-ouest), avec toutefois
des intrusions méditerranéennes sous la forme du vent d’autan
(marin dans le Lauragais oriental). D’autres masses d’air peuvent
intervenir : en hiver, l’Anticyclone d’Europe Centrale envoie de
l’air sibérien, réveillant un autan glacial ; l’air
saharien qui abandonne des pluies ou des poussières rougeâtres,
quand il remonte sur la Méditerranée occidentale.
Les précipitations sont irrégulières et se concentrent
principalement pendant les mois de mai et juin (84 mm en mai, 73 mm en moyenne
la première quinzaine de juin). Cependant, des exceptions surviennent
comme à Belpech avec 129 mm en moyenne au mois de mai. Le printemps
est instable, frais et humide (avril plus humide que mars).
La répartition des pluies est disparate selon les régions :
plus de 800 mm de pluies annuelles sont relevées du côté
de la Piège (cantons de Fanjeaux, de Belpech et de Salles sur l’Hers).
La Montagne Noire reçoit quant à elle entre 1000 et 1500 mm
par an. Il tombe entre 700 et 800 mm sur la plupart des collines du Lauragais
occidental et moins de 700 mm dans le couloir central de Castanet à
Naurouze et dans les dépressions du Fresquel et du Tréboul.
Les précipitations sont aussi irrégulières selon les
années : par exemple, Villefranche recevait 1493 mm en 1923, tandis
que 405 mm tombait en 1967(la moyenne est de 700 mm).
L’hiver n’est pas très rude en Lauragais et il est peu neigeux,
les premières gelées apparaissent vers la Noël. Le froid
cesse au début du mois de mars, des gelées blanches sont encore
possibles jusqu'à début mai.
C’est à partir du 24 juin environ que le changement de temps est
radical puisqu’éclate brutalement l’été avec
une canicule qui dépasse les 26°C en moyenne en juillet et des
records atteignant ou dépassant les 40°C. Une grande sécheresse
peut survenir entraînant la pénurie en eau des ruisseaux.
Les premières
gelées en Lauragais
Le
Lauragais, c’est aussi le pays du vent car l’agitation de l’air
est incessante et les journées calmes sont rares. Le vent d’autan
est le vent maître du Lauragais, de secteur sud-est ; il rythme les
journées soufflant en fortes rafales pouvant atteindre les 80 à
100 km/h. D’abord lent en début de journée, il s’accélère
avant de se calmer en soirée. Parfois, après plusieurs jours
de violence, il s’arrête pour laisser s’installer le cers
(vent d’ouest ou nord-ouest), autre vent du Lauragais qui amène
la pluie.
Appelé marin vers Castelnaudary et Bram, le vent de sud-est devient
autan ailleurs remontant en direction de Toulouse, Agen, Auch, Cahors, Rodez
avec des vitesses maximales relevées vers Castres, Revel ou Saint Félix.
On distingue deux types de vent d’autan appelé "vent fou"
: l’autan noir peut amener des précipitations, mais ne dure pas
plus de 1 à 2 jours ; l’autan blanc anticyclonique est plus vigoureux,
plus fréquent (il peut durer une semaine), chaud, sec et correspond
en altitude à une circulation d’est, sud-est.
L’autan résulte d’un effet de barrière venant des
Pyrénées. Un flux méridien crée, sous le vent
de la chaîne, une petite zone de basses pressions dynamiques. Ce centre
d’action amorce le mouvement en attirant autour de lui l’air méditerranéen
par le couloir du Lauragais. Un effet de foehn peut s’y ajouter : déchargé
de son humidité sur le versant espagnol, l’air en redescendant
sous le vent de la montagne, perdra rapidement de son humidité et se
réchauffera. Dès lors, cet effet thermique vient renforcer la
petite dépression dynamique augmentant la vitesse du vent près
de la Montagne Noire, comme à Revel et à Saint Ferréol.
La
météorologie populaire
Face à la météorologie scientifique qui permet grâce
aux ordinateurs de disposer de prévisions quantitatives d’un grand
nombre d’éléments du temps pour des échéances
qui augmentent avec les progrès de la connaissance, la météorologie
populaire est toujours importante. Celle-ci est née de la nécessité,
pour un certain nombre de personnes, de prendre en compte "le temps"
pour l’organisation de leurs activités.
Dès les temps les plus anciens, le monde paysan est prodigue en maximes
ou proverbes. Il était donc toujours attentif au temps qu’il faisait
et cherchait à élaborer des règles pour déterminer
le temps qu’il allait faire. Le Lauragais regorge de tels dictons :
Se l’auta bufo a sant Marti,
Tou l’an sera pel cami.
Si l’autan souffle à la St Martin,
Il soufflera une bonne partie de l’année
Une
inscription sur la façade "Auta" (sud-est) du hangar Bordeblanche,
route de Gardouch à Villefranche, au lieu-dit la Prade, faisait connaître
l’année agricole idéale :
En Février, les fossés comblés
En Mars, crevassés
En Avril, pluies fréquentes
En Mai, incessantes
Pas une goutte en Juin
Et le pays ne manquera de rien.
La météorologie populaire présente bien sûr des
limites. Le dicton n’est donc que la traduction d’un ensemble de
faits qui n’étonneront aucunement le scientifique et qui permet
aux agriculteurs de prévoir le temps de façon amusante.
Sé l’hiber ba soun dreit cami
L’aouren per la Sant Marti
Més sé rencountro un passant
L’aouren per la Sant Clément
E sé par malhur sé tort un pé
Sera aqui per Sant André
Si l’hiver est normal
Nous l’aurons à la Saint Martin (11 novembre)
Mais s’il rencontre un obstacle
Nous l’aurons à la Saint Clément (23 Novembre)
Et si malheureusement il se fait une entorse
Nous l’aurons à la Saint André (30 Novembre)
La météorologie moderne
La météorologie scientifique commence dès Aristote qui
conçoit que les phénomènes météorologiques
obéissent à des lois de la nature et qu’ils ne sont pas
dus simplement au hasard ou à des forces irrationnelles. Il a fallu
attendre le XVIIème siècle pour que des théories s’édifient
donnant l’idée de réaliser certaines expériences
pour vérifier l’observable. Néanmoins, sur le plan pratique,
les progrès restent réduits. Aussi, la météorologie
concrète est-elle peu développée, peu organisée
jusqu’au début du XXème siècle.
La météorologie moderne est née lorsque la coopération
internationale est apparue nécessaire et a pu se réaliser dans
le domaine de la transmission des observations. Les centres météorologiques
ont pu ainsi établir des cartes de la situation globale du temps jour
après jour et procéder à une analyse, à une compréhension
de l’état de l’atmosphère.
Les spécialistes identifient des masses d’air (pressions et températures
différentes) et placent des limites entre ces masses d’air, dessinant
ainsi les fronts (front chaud d’une perturbation : ciel couvert, pluie
faible ou bruine / front froid : pluie soutenue, ciel d’averses).
Importance
du climat dans le Lauragais agricole
Pour envisager des prévisions fiables, dignes de confiance, il a fallu
attendre le développement des ordinateurs pour simuler l’évolution
de l’atmosphère. Un grand nombre de calculs permet de résoudre
des équations complexes. Les spécialistes élaborent des
cartes de prévisions et s’appuient sur les stations locales de
mesure. Ces stations, comme celle de Revel St-Ferréol, permettent de
relever la température sous abri à 1,50m du sol (appareil utilisé
: le thermographe), l’humidité de l’air (l’hydrographe),
la pression atmosphérique (le barographe ou baromètre), le vent
(l’enregistreur de vent : la girouette donne la direction du vent tandis
que l’anémomètre permet de mesurer sa vitesse). Le degré
de luminosité (ciel couvert, peu nuageux ou ensoleillé) est
noté par l’observateur.
La météorologie n’est pas une science toujours exacte,
mais les progrès d’une meilleure connaissance des phénomènes
et des prévisions locales sont réels. Chacun depuis sa localité
doit pouvoir, à partir des bulletins météorologiques
et de son expérience du climat qu’il fait en Lauragais, se faire
une idée du temps pour le lendemain, comme le font souvent les agriculteurs.
Arnaud
BOUDET
DESS Géographie Physique
Saint Orens de Gameville
Dictons
populaires en Patois :
Collection Odette BEDOS
Bibliographie :
1. Lauragais, pays des Cathares et du Pastel, par Jean Odol aux éditions
Privat
2. La Météo de A à Z, présenté par la Météorologie
Nationale aux éditions Stock
3. Météorologie de Météo-France de C. Billard,
Ministère de l’Education Nationale, Ministère des Transports.
Qu’est-ce
que la Météorologie ? |
Crédit photos : Collection Couleur Média
Couleur Lauragais N°42 - mai 2002